Article de Laurent Borrendon, paru sur LeMonde.fr le 26/10/2011
Le Livre blanc sur la sécurité publique remis au ministre de l’intérieur, mercredi 26 octobre, revient sur la modification du régime de la garde à vue en vigueur depuis avril : droit à garder le silence et présence de l’avocat obligatoire. Les auteurs reconnaissent qu’il n’est pas question de revenir sur la réforme, mais ils identifient deux inconvénients majeurs : « des stratégies d’obstruction dans la manifestation de la vérité » et un alourdissement de la charge procédurale.
Tout d’abord, il est donc « souhaitable de réfléchir aux conditions d’introduction en droit français d’un délit d’ ‘entrave à l’enquête judiciaire’ pour réprimer l’attitude d’un gardé à vue qui, interrogé par les enquêteurs, mentirait pour [les]tromper alors même qu’il a connaissance de faits qui, sans l’impliquer personnellement, seraient de nature à favoriser l’élucidation de l’affaire, à recueillir des preuves ou à appréhender le ou les auteurs ou complices ».
Deuxième proposition importante, la création d’une « retenue judiciaire » d’une durée limitée à quatre heures pour certains délits, « par exemple ceux punis d’une peine inférieure ou égale à trois ans comme le vol à l’étalage, l’usage simple de stupéfiants ou encore le port prohibé d’un couteau ou d’une arme par destination ». Jusqu’ici, toute rétention implique un placement en garde à vue, avec les protections qui lui sont liées. « Cette mesure ne pourrait être décidée qu’en cas de renoncement volontaire de la personne retenue à la présence d’un avocat et ce, dès le début de la retenue », précise le texte.
La proposition trouve l’oreille du ministre de l’intérieur, Claude Guéant : « Je trouve que c’est intelligent. Cela correspond à certains types de délinquance. Il faudrait que la retenue judiciaire s’accompagne d’un formalisme réduit. » Lors de la discussion de la loi sur la garde à vue, au début de l’année, la possibilité d’une « audition libre », sans avocat ni garantie particulière, avait été envisagée, puis repoussée, car considérée comme trop peu protectrice.
Enfin, les auteurs défendent également « l’extension des dispositions dérogatoires existantes en matière de lutte contre la criminalité organisée à d’autres infractions très graves, essentiellement l’homicide volontaire ou l’enlèvement de personnes ». Ces mesures permettent de retarder la présence de l’avocat jusqu’à la 48e heure de garde à vue.