L’entrepreneur de l’insertion

Le centre qu’il dirige à Chanteloup-les-Vignes emploie 100 personnes. Près de 5 000 tonnes de textile sont collectées chaque année. Outre un contrat, le Relais propose aussi un suivi social et une formation qualifiante pour ses employés. « Deux tiers des gens qui passent par chez nous ont ensuite une situation durable, soit une formation qui mène à un emploi, ou sinon un contrat dans une entreprise » souligne Jean-François. Ce dernier démarche aussi les entreprises locales pour cerner leur besoin à l’embauche et proposer les qualités de ses employés. « À la différence de Pôle Emploi, on connaît nos salariés. On les a vus travailler et on peut s’engager sur leurs qualités professionnelles. Pour nos salariés, c’est une façon d’effacer l’ardoise et d’être jugés sur leur professionnalisme, non pas sur leur passé. »

En 2006, Jean-François est allé voir ailleurs comment développer son Relais : « on ne pouvait plus trop se développer dans le Val de Seine où il y avait désormais plusieurs centres. Je suis allé à Bordeaux lorsque Alain Juppé, fraîchement réélu, affirmait qu’il accueillerait des projets écologiques. » Celui du Relais est accepté et 100 bornes de collecte sont posées dans la ville. Le Relais Gironde ouvre en 2008, l’usine de tri en 2014 et 55 personnes ont été embauchées. Jean-François voit plus loin encore : « Les Français jettent en moyenne 6kg de vêtements et chaussures par an et par habitant. Pour l’instant, on en collecte seulement 2 kg par habitant. C’est une mine d’emplois ! » Reste que certaines collectivités sont frileuses à l’idée de « dégrader » le paysage urbain de ces conteneurs. Ces derniers sont parfois la cible de vols qui n’encouragent pas des élus déjà réticents à accueillir les bornes du Relais.

En plus de ses allers-retours entre la région parisienne et Bordeaux, Jean-François Luthun est aussi président de Défi Service depuis 2004, une association d’insertion qui réintroduit les exclus du marché du travail via des petits boulots de service à la personne. Il a également trouvé le temps de créer en 1996 une autre scop, Espérance, spécialisée dans le conditionnement, avec toujours l’insertion en point de mire. Les 50 employés emballent, entre autres, des produits présentés en tête de gondole des supermarchés, ces fameux « trois pour le prix d’un ». L’Oréal est d’ailleurs l’un de leurs plus gros clients. Pourtant, il insiste, au Relais comme à Espérance, les contrats sont décrochés grâce à la qualité du travail effectué. «  Le volet insertion est la cerise sur le gâteau pour nos clients, pas l’élément déterminant. On est réactif et on fournit un travail de qualité, c’est le plus important.  » Une façon de souligner la normalité de ces entreprises-là, compétitives certes, mais aussi sociales et participatives.

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