Permissions des détenus : Christiane Taubira n’exclut pas de modifier la loi

La garde des Sceaux est désormais obligée de donner des gages au gouvernement auquel elle appartient, alors que grimpent violence et délinquance.

La pression est montée si haut que Christiane Taubira n’a pas le choix: elle est désormais obligée de donner des gages au gouvernement auquel elle appartient, alors que grimpent violence et délinquance. Elle l’a fait mardi, en promettant d’«examiner s’il y a lieu de modifier la législation applicable aux sorties des détenus». Un pas que la garde des Sceaux n’aurait jamais franchi, il y a encore quelques jours, lorsqu’elle fêtait en grande pompe la première année de la contrainte pénale au tribunal de Créteil. En ces temps qui paraissent soudain très lointains, la ministre de la Justice défendait encore les vertus d’une lutte contre la délinquance et la récidive fondée sur les peines exécutées en milieu ouvert pour éviter la prison, selon elle, criminogène. Aujourd’hui, la Chancellerie commande des rapports tous azimuts, via la Direction des affaires criminelles et des grâces pour connaître des dysfonctionnements ayant mené aux évasions en série de ces dernières semaines.

Vers des sorties sous escorte

Mais avoir rappelé mardi, durant la séance de questions au gouvernement, que le pouvoir confié au juge de l’application des peines (JAP) était dû aux lois Perben de 2004, ne suffira pas à faire oublier ses positions tant elle les a défendues avec conviction.

À deux mois d’élections régionales à très haut risque pour la majorité, il faut cependant, au moins en apparence, que la garde des Sceaux se coule dans le moule d’une justice plus rigoureuse. «En tant que ministre, ma responsabilité est aussi de tout faire pour que le suivi des détenus soit le plus serré et le plus adapté à la personnalité des individus pour éviter que de tels drames ne se reproduisent», a-t-elle promis. De même, a-t-elle assuré que «les sorties de certains détenus se feraient désormais sous escorte». Un vœu pieux quand on sait combien la question est problématique pour une Administration pénitentiaire en sous-effectifs chroniques. Cette dernière a déjà du mal à acheminer dans les temps les détenus jusqu’aux tribunaux pour les auditions et les procès. Quant au suivi des détenus, aucun magistrat ne niera que c’est ici que le bât blesse. «Les rapports que les juges de l’application des peines reçoivent sont souvent indigents. On leur vend du rêve sur des détenus», souligne ce magistrat.

Peu dupe de l’effet d’annonce, Claude Goasguen, le député LR de Paris, a mis les pieds dans le plat, mardi sur la chaîne LCPAN: «Modifier la législation sur les sorties des détenus, c’est revoir par la loi les pouvoirs des juges de l’application des peines qui font preuve d’angélisme pénal et qui sont si faciles à gruger», a-t-il affirmé. En séance, Georges Fenech, député du Rhône, en charge des questions de justice pour les Républicains, martelait sans concession: «L’exécution des peines et la lutte contre la récidive sont aujourd’hui en faillite avec votre politique.»

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