«On ne peut pas parler de droits de l’homme dans les prisons»

Article publié le 15/11/2010 sur libération.fr



Céline Verzeletti, secrétaire générale de la CGT-pénitentiaire, revient sur les causes du mécontentement du personnel pénitentiaire.


Plusieurs centres pénitentiaires, dont celui de Fleury-Mérogis, ont été bloqués lundi par leurs personnels. Les syndicats (FO, CGT, CFDT, FSU) appellent à une deuxième journée d’action le 24 novembre.

Le mouvement a demandé à être reçu par le nouveau ministre de la Justice, Michel Mercier, afin de revoir à la hausse le budget alloué aux prisons. Céline Verzeletti, secrétaire générale de la CGT-pénitentiaire, revient sur les causes de la mobilisation.
Pourquoi le personnel pénitentiaire se mobilise-t-il?


La situation du personnel dans les prisons est très critique: à Fleury-Mérogis, nous sommes un surveillant pour 90 détenus, alors qu’il en faudrait un pour 40 ou 50. Pendant les promenades, il y a deux surveillants pour 300 à 400 détenus. Le budget 2011 ne prévoit pas suffisamment de créations de postes.


Cette situation va empirer. Le personnel va devoir assurer de nouvelles missions comme les transferts judiciaires, à partir du 1er janvier 2011. Les forces de l’ordre assuraient auparavant ces missions. Mais le personnel pénitentiaire n’est pas formé pour cela, c’est une position complètement irresponsable.


Quels sont les problèmes posés par le manque de personnel?

C’est devenu impossible d’assurer nos missions de surveillance, de sécurisation et d’insertion des prisonniers. A Fleury-Mérogis, on est en surpopulation avec 3 200 détenus pour 2 800 places. S’il y a un incident, on ne peut pas intervenir. On ne peut pas parler de respect des droits de l’homme dans les prisons.


Il y a aussi la difficulté d’appliquer les règles pénitentiaires européennes qui prévoient d’assurer l’accès des détenus à des activités sportives ou ludiques. Mais comme on manque de personnel, c’est très difficile de les organiser. Du coup, une mesure qui était censée améliorer les choses devient inapplicable, parce qu’elle n’est pas pensée en amont. Ce sont des mesures d’affichage.


Quelles solutions pour améliorer cette situation?

Le gouvernement mise tout sur la construction de nouvelles prisons, où le personnel est remplacé par des caméras de surveillance. Ce sont de grands endroits déshumanisés avec des plafonds bas et sans lumière. Il n’y a plus de lien humain entre le gardien et le détenu. Cela rend encore plus dure la sensation d’isolement.


En France on privilégie le tout-carcéral. Du coup environ 25% des personnes sous écrous purgent des peines de moins de six mois. La construction des prisons a un coût énorme alors qu’il existe des solutions alternatives à l’extérieur. Mais cela implique de renforcer le budget des travailleurs sociaux.

source : liberation.fr
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