Non-exécution des peines : l’offensive du préfet Gaudin

Article de Jean-Marc Leclerc paru sur LeFigaro.fr le 27 aout 2010


La non-exécution des peines? Elle est à ce point inscrite dans les mœurs judiciaires qu’un service de police la combat à temps plein dans la capitale. Cette unité de cinquante fonctionnaires, unique en son genre, va même prendre de l’ampleur, au point de se transformer en une sorte de service de marshalls à la française, compétent sur Paris et ses trois départements limitrophes (Hauts-de-Seine, Val-de-Marne et Seine-Saint-Denis). Le préfet de police de Paris, Michel Gaudin, vient en effet de décider d’étendre au Grand Paris l’action du Service d’exécution des décisions de justice (SEDJ) de la police judiciaire.


Ses limiers prenaient déjà les ordres des magistrats parisiens du TGI et de la cour d’appel. Désormais, ils pourront également être saisis par ceux de Nanterre, Créteil et Bobigny, dans cette Seine-Saint-Denis qui représente, à elle seule, le plus gros vivier de délinquants au plan national après Paris.


Leur mission: ramener derrière les barreaux ou devant leur juge d’application des peines les personnes condamnées, mais qui, laissées libres, ont disparu de la circulation. Il suffit pour cela que la justice réclame le condamné en vadrouille et que son dernier domicile connu se trouve en région parisienne.


L’an dernier, les hommes du SEDJ ont été saisis de 3500 affaires (un chiffre en croissance de 20% par an en moyenne), identifiant et arrêtant un bon millier de voyous en goguette, dont 192 sont immédiatement repassés par la case prison. Parmi les 2500 restants, soit les délinquants demeuraient introuvables, soit leur dossier a dû être renvoyé à un autre tribunal, la PJ ayant découvert qu’ils n’habitaient plus le ressort de Paris, soit ils étaient déjà en prison, ce que la justice ignorait…


Dans l’esprit du préfet Gaudin, le SEDJ doit travailler un peu à la manière de l’Office central chargé de rechercher les fugitifs de haut vol, type Colonna ou Ferrara. À cette différence près que le «client» ne tient pas ici le haut de l’affiche. Petite frappe de cité, dealer, arracheur de sac multirécidiviste, il peut malgré tout être dangereux. «Nous arrêtons des braqueurs condamnés à cinq ans de prison», souligne un commissaire.


Chaque jour, trois groupes d’enquêteurs du SEDJ se répartissent les «objectifs» à aller cueillir. Les voitures banalisées partent au petit matin du quai de Gesvres, sur l’île de la Cité. «Nous arrêtons en moyenne trois personnes par jour et le rythme va inévitablement s’accélérer après la réforme», explique Jean-Jacques Herlem, directeur adjoint à la PJ parisienne.


«Le gibier est plutôt méfiant, poursuit un policier. Fréquemment, nous avons affaire à des délinquants qui utilisent d’innombrables alias et pseudo, vivant sous de fausses identités et n’habitant évidemment jamais à l’adresse indiquée.»


Il faut alors diligenter de minutieuses enquêtes de voisinage, questionner la famille du condamné, ses amis, et recourir, au besoin, aux systèmes d’écoute téléphonique qui permettront de capter l’indiscrétion fatale à celui qui aurait préféré se faire oublier.

source : LeFigaro.fr
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