Décryptage des propositions de la députée Nathalie Nieson (PS) pour une nouvelle politique d’aide aux victimes

Créer une « sur amende », contribution financière spécifique à la charge des auteurs d’infractions afin d’augmenter le financement de l’aide aux victimes. Telle est la mesure phare du rapport de la députée Nathalie Nieson (PS), remis fin juillet à la Garde des Sceaux, pour renflouer les caisses des associations, fragilisées par une baisse continue des crédits publics. Un document qui formule également plusieurs pistes pour améliorer la gouvernance de cette politique publique nationale.

 

Avec ses propositions, la députée Nathalie Nieson (PS) espère donner un nouveau souffle à l’aide aux victimes. Dans son rapport ministériel de 37 pages que la Gazette s’est procuré, remis le 24 juillet à la Garde des Sceaux, la députée de la Drôme avance 20 propositions, dont plusieurs d’ordre financier, destinées à impulser une nouvelle politique nationale d’aide aux victimes et à accroître les ressources des associations en prises à de lourdes difficultés financières.

 

Mesure phare et emblématique du rapport : créer une « majoration des amendes pénales ». En d’autres termes, faire participer les auteurs d’infractions condamnés, sur leurs propres deniers, au financement des actions d’aide aux victimes. Au-delà de cet enjeu financier, vital pour l’activité de ce secteur associatif, le rapport insiste sur la nécessité que l’aide aux victimes redevienne « une politique publique nationale à part entière », avec un ministère de la Justice véritable chef de file chargé d’animer cette politique nationale au niveau territorial « en concertation avec tous les partenaires locaux ».

 

Faire payer les délinquants – Portée depuis plusieurs années par l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation (Inavem [2]), l’idée de mettre à contribution les auteurs d’infractions au profit des victimes, franchit aujourd’hui une étape supplémentaire, même si jusqu’à présent, Christiane Taubira n’a pas caché ses réserves à son sujet.

 

Concrètement, selon le rapport, il s’agirait pour toute infraction pénale de « prévoir qu’une contribution d’un montant de 10 euros s’ajoute au montant réclamé » aux personnes condamnées.

 

Cette quote-part supplémentaire de l’amende qui serait acquittée, servirait de contribution aux actions d’accompagnement juridique et psychologique des victimes mises en œuvre par les associations.

 

Dans le même esprit, le rapport propose également de « prélever une partie du produit des amendes de composition pénale ou de les augmenter d’une somme forfaitaire de 10 euros », ces dernières étant, quant à elles, recouvrées au moyen de timbres fiscaux et reversées directement au Trésor.

 

Supprimer la minoration des amendes – Aux côtés de cette « sur amende », la députée socialiste préconise de reverser une partie du produit des ventes des biens saisis réalisées par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et des biens confisqués (AGRASC) et par l’administration douanière.

 

Formulée par les services du ministère de la Justice lors des auditions, et retenue par le rapport Nieson, la réduction, voire la suppression, de l’abattement de 20 % applicable au paiement des amendes acquittées dans un délai d’un mois, pourrait voir le jour. Une mesure qui génèrerait « des revenus significatifs ».

 

Enfin, un fonds national d’aide aux victimes d’infractions pénales (FNAVI) serait créé pour collecter les « nouvelles ressources affectées à la mission d’accompagnement des victimes ».

 

Fragilisation financière – Une palette de mesures jugées nécessaires face au constat sombre dressé par le rapport. Les associations se sont transformées, au fil des années, en « chasseuses de prime ». Nombreuses sont celles qui « ont dû déposer le bilan, réduire leur activité ou licencier leurs personnels », sous l’effet d’abord d’une baisse continue du financement du ministère de la Justice et de l’État, et par un effet « de domino », dans certains cas, de celle des subventions des collectivités territoriales.

 

Certes, le financement de ces dernières – premier contributeur public – demeure très important. Mais « une marge de progression existe », relève la députée, qui préconise dans le même temps la réalisation d’une étude afin d’avoir « une idée exacte des financements mobilisés ».

 

Ces propositions interviennent ainsi dans un contexte d’extrême précarité financière, alors qu’il est pourtant nécessaire d’amplifier « l’effort en direction d’un plus grand nombre de victimes », relève le rapport.

 

Pour Nathalie Nieson, les associations remplissent une « vraie mission de service public » pour un faible « coût/victime » estimé à 156 euros, et calculé sur la base d’un budget global du secteur de 40 millions d’euros.

 

Améliorer la gouvernance – Le rapport s’attache également à présenter plusieurs orientations dont l’ambition est de redynamiser cette politique publique. À l’appui du retrait progressif et « vivement regrettée » du ministère de la Justice comme financeur principal, le rapport constate que « le pilotage de l’aide aux victimes qui devrait revenir aux Cours d’appels et aux TGI est ainsi délégitimé ».

 

Plusieurs propositions sont donc formulées afin d’améliorer la gouvernance. La députée socialiste souhaite d’abord que l’aide aux victimes redevienne « une politique publique nationale à part entière en réaffirmant le devoir de l’Etat, responsable de l’ordre public vis-à-vis des victimes » et suggère que le ministère de la Justice redevienne le chef de file « historique » de cette politique publique nationale.

 

Le Conseil national d’aide aux victimes (CNAV), structure actuellement en sommeil, pourrait devenir « une véritable instance indépendante de veille, de concertation et de conseil permettant de relancer la réflexion nationale et la concertation sur l’aide aux victimes ».

 

Enfin, le document propose une approche territoriale s’appuyant sur les régions et les départements pour déterminer les moyens à affecter en priorité.

 

Pour l’auteure du rapport, « Il est urgent d’agir » pour diversifier les sources de financement et donner une nouvelle bouffée d’oxygène aux associations d’aide aux victimes. « Il y a nécessité de mettre en œuvre un système rénové certes, mais qui conserve son caractère public et gratuit et qui assure « l’effectivité des droits des victimes » et en particulier ceux des plus vulnérables et démunies », conclue-t-elle. Autant de nouvelles pistes concrètes mises sur la table de la Garde des Sceaux, qui ne devrait pas rendre ses premiers arbitrages avant fin septembre 2013.

 

P. Weil | A la Une prévention-sécurité | Actu experts prévention sécurité | Publié le 30/08/2013

Pour accéder à l’article original, c’est ici

 

 

source : Lagazettedescommunes.com
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