Conjoints violents : «En prison, je me serais suicidé»

A Besançon, le projet Altérité accueille des hommes en attente de procès ou déjà condamnés pour des violences sur leurs compagne ou enfants. Ils y alternent groupes de parole et suivi psychologique pour éviter la récidive et entamer une prise de conscience.

D’emblée, il prévient : il est bavard. On dirait plutôt intarissable. Tony (1), 30 ans, pourrait parler pendant des heures de la deuxième chance qu’on lui a offerte il y a trois mois. Poursuivi pour des violences envers sa femme et son fils, il a pu intégrer un centre d’accueil et d’hébergement pour auteurs de violences conjugales et intrafamiliales. Baptisé Altérité, le projet a vu le jour en octobre à Besançon (Doubs).

Dans ce département, les violences intrafamiliales représentaient un tiers des violences totales enregistrées en 2017. L’objectif est d’éloigner les auteurs présumés ou déjà condamnés du domicile de leur victime, explique Sébastien Girin, responsable du centre : «C’est une manière d’éviter une double peine pour les victimes, qui se retrouvent souvent dans des situations traumatisantes quand elles sont obligées de partir. Et cela a aussi des conséquences sur les enfants, éloignés de leur école ou de leurs copains.»

«Des choses à exprimer»

Deux types de profils sont accueillis dans ces quinze logements autonomes, toujours sur décision de justice : des auteurs déjà condamnés pouvant bénéficier d’un aménagement de peine ou des hommes sortant de garde à vue, placés sous contrôle judiciaire dans l’attente de leur procès. C’est le cas de Tony, qui lâche : «Après ma garde à vue, c’était soit l’incarcération [en détention provisoire, ndlr]soit un placement ici. En prison, je me serais suicidé.» Il préfère ne pas nous recevoir dans son petit appartement meublé, mis à sa disposition en échange d’une participation aux frais d’hébergement de 80 euros par mois. Trop intime. Alors c’est dans la salle commune où se tiennent d’ordinaire les groupes de parole et ateliers de médiation qu’il se raconte, un brin nerveux.

Griffonnés sur un tableau laissé dans un coin de la pièce, des schémas symbolisent l’engrenage de la violence, ou les membres du couple dans des cercles : chacun dans un rond, ils se rejoignent de temps à autre. «Ces dessins m’ont aidé à comprendre qu’on peut avoir des attentes différentes, parfois», commente Tony. Il préfère ne pas évoquer sa profession, par crainte d’être identifié. Sa jambe droite ne cesse de trembler. Son regard en revanche, reste fixé droit devant lui. «Fréquenter des taulards, je ne vois pas en quoi ça m’aurait aidé»,estime-t-il. Il ne cache pas en avoir eu besoin. Besoin d’être écouté, surtout : «J’avais des choses à exprimer, des sentiments. Je ne pouvais pas le faire avec ma femme. En fait, personne ne me comprenait.»C’est auprès de la psychologue de la structure et de l’assistante sociale, qu’il considère un peu comme des «grandes sœurs», qu’il a trouvé de l’attention. Chaque semaine, comme les autres hommes hébergés ici, Tony doit voir l’une et l’autre au moins une fois.

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