La parole est donnée à Gill Kelly, qui a animé une formation sur les entretiens motivationnels suivie par les équipes sociales de l’APCARS.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
J’ai travaillé 23 ans comme officier de probation, avec un intérêt constant quant à la qualité et l’évolution de ma pratique professionnelle. J’avais la chance de travailler, pendant cette période, avec une collègue qui partageait ma vision et nous avons toutes les deux décidées, il y a 15 ans, de quitter ce service de probation pour nous réorienter vers notre passion commune, la formation des professionnels du secteur judiciaire. Depuis, nous travaillons à les accompagner dans la mise en pratique de nouvelles techniques et approches reconnues pour leur efficacité (‘What Works’).
En quoi consistent les entretiens motivationnels ? Quels sont les bénéfices d’une telle pratique ?
L’Entretien Motivationnel est une méthode de communication directive, centrée sur la personne, et visant au changement de comportement par l’exploration et la résolution de sa propre ambivalence, souvent frein au changement.
Cette approche se base donc sur l’empathie, l’évocation de facteurs positifs de changements ainsi qu’une démarche collaborative et positive pour permettre à l’individu de formuler de façon autonome ses propres solutions.
Ainsi, pratiquer l’approche de l’EM consistent principalement à :
- Poser des questions ouvertes,
- Valoriser
- Adopter une écoute réflective et empathique,
- Proposer des résumés en appuyant sur les éventuelles incohérences et les objectifs à atteindre
Pour les usagers, cette pratique favorise :
- Une meilleure prise de conscience de ses propres comportements,
- Une approche plus constructive,
- Elaborer un plan d’action permettant de réaliser les changements nécessaires.
Pour les praticiens, elle permet de :
- Réaliser une évaluation complète de la situation,
- Proposer un suivi, à la fois pertinent et réaliste,
- Adapter le suivi à la motivation de la personne suivie,
- Encourager la personne à s’engager activement.
D’après votre expérience, quelles sont les principales différences en matière de réinsertion entre la France et le Royaume Uni ?
Je crois que les situations rencontrées en matière de réinsertion sont relativement similaires entre nos deux pays.
La différence majeure tiendrait plutôt au fait qu’en Angleterre nous nous intéressons davantage aux risques que peuvent représentées les personnes mises en cause pour la société, plutôt qu’à son accompagnement social. En général, en Angleterre, les auteurs de violences ou d’agressions sexuelles restent sous la responsabilité du National Probation Service (équivalent anglais du SPIP) qui articule, dans un premier temps, ses efforts sur la réduction du risque et le contrôle du comportement criminel.
A l’inverse, pour les personnes qui représentent un risque moindre pour la société, notre approche a récemment changé pour donner la priorité à un accompagnement basé sur la gestion des difficultés personnelles, sociales et sanitaires (problèmes familiaux, consommations de drogues, recherche d’emploi, situation financières, etc). Cet accompagnement est réalisé par des sociétés privées avec un modèle pluridisciplinaire.
Quels avantages voyez-vous à des échanges entre professionnels de différents pays, par exemple à travers des formations comme celle que vous avez animée à l’APCARS ?
Cette formation a été très bénéfique pour moi. Par les échanges que j’ai eus avec les participants, j’ai pu approfondir ma connaissance du secteur socio-judiciaire, en découvrant son fonctionnement en France. J’ai maintenant une meilleure compréhension des responsabilités de chacun des acteurs (agents de probation, juges d’applications des peines, etc), de leur lien avec les équipes sociales de l’APCARS et cela me sera très utile pour les formations que j’anime en Angleterre.
Par ailleurs, j’ai été frappée par le fait que les travailleurs sociaux, qu’il soit en France ou en Angleterre, partagent des mêmes valeurs et sont confrontées à des situations similaires dans l’accompagnement des usagers. Mon expérience étant limitée à l’Angleterre, il était très intéressant de pouvoir évaluer les forces et les faiblesses d’un autre système.